Bras de fer parlementaire autour des lois de bioéthique
Alors que le Sénat a voté en avril 2011 en faveur d’une autorisation encadrée, la recherche sur l’embryon sera au cœur de l’examen en deuxième lecture du projet de loi de bioéthique à l’Assemblée nationale, qui débute mardi 24 mai.
Tout va se jouer cette semaine. Entamée il y a bientôt trois ans, la révision des lois de bioéthique entre dans sa dernière ligne droite avec l’examen du texte en deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Dès mardi 24 mai, et jusqu’à vendredi 27 mai, les députés vont à nouveau plancher sur ce texte fondateur dont on peut désormais dessiner les grandes lignes, à une exception près : la recherche sur l’embryon.
Depuis le début de l’année, le sujet a donné lieu à de nombreux rebondissements. Le dernier en date : le vote en commission spéciale de l’Assemblée d’un texte autorisant ce type de recherche, interdit (avec dérogations) depuis la loi de 2004. Ce choix, le Sénat l’avait fait dès le mois d’avril, prenant à revers le gouvernement. Le vote de la commission spéciale était d’autant plus surprenant que lors de la première lecture à l’Assemblée, elle avait rejeté l’autorisation, préférant protéger l’embryon.
L’inconnue réside désormais dans l’attitude des députés en séance publique. Député villiériste de Vendée, Dominique Souchet a lancé jeudi 19 mai un appel cosigné par 57 de ses collègues dans l’hebdomadaire Valeurs actuelles, dénonçant « l’impasse scientifique » et les dangers de la recherche sur l’embryon. « Passer de l’interdiction à l’autorisation est une transgression capitale ! », s’insurge le député.
« Je ne ferai rien qui puisse gêner la majorité parlementaire »
De fait, l’autorisation encadrée a de nombreux partisans, à commencer par le député PS de la Vienne, Alain Claeys. « C’est la position la plus logique », estime le président de la commission spéciale, jugeant « hypocrite » une interdiction que l’on assortit de dérogations et qui permet dans les faits aux chercheurs de travailler sur les cellules souches embryonnaires.
Sur ce sujet, la gauche est derrière lui ; mais aussi plusieurs députés de droite comme Yves Bur (UMP, Bas-Rhin), Bernard Debré (UMP, Paris) ou encore Olivier Jardé (Nouveau Centre, Somme), qui ont fait basculer le vote en commission. Pour ce dernier, les cellules IPS (des cellules souches adultes reprogrammées pour retrouver les caractéristiques de celles de l’embryon) « ne sont pas fiables à 100 % » et la France passe à côté de programmes de recherche internationaux en raison d’une législation illisible à l’étranger.
Pourtant, le rapporteur de la commission, Jean Leonetti, est convaincu que l’autorisation sera finalement repoussée en séance publique. Assuré du soutien du gouvernement, il pense que les élus de droite favorables à l’autorisation ne mettront pas l’exécutif en difficulté sur un sujet hautement symbolique, un an avant l’élection présidentielle de 2012.
Ce que confirme l’un d’entre eux. « Je ne ferai rien qui puisse gêner la majorité parlementaire », confie Jean-Sébastien Vialatte, député UMP du Var. Tout en souhaitant que l’interdiction soit levée, ce biologiste se contenterait du régime actuel « car l’essentiel, c’est que la recherche puisse se faire ». Il n’y a donc pas lieu, conclut-il, « de provoquer un psychodrame dans l’hémicycle ».
MARINE LAMOUREUX