Voix de stentor mise au service d’un beau français, tribun populaire à la faconde vigoureuse, où le rythme du verbe l’emporte sur le sens des propositions, tant il est important de charmer d’abord, pour convaincre ensuite…
Je suis l’inverse !
Plus habitué à écouter qu’à disputer, rien ne me répugne tant que de me laisser entraîner dans le feu du discours par le crescendo des mots, et dire ce que ma raison, ensuite, me reprocherait. On m’explique que j’ai tort, et c’est sans doute vrai, parce que la politique n’est pas une science exacte et que convaincre passe nécessairement par la capacité à entraîner, à séduire, à faire comprendre les enjeux, avant de proposer les solutions.
Il me reste beaucoup à faire sur ce chemin, mais, peut-être, mes analyses placides et mesurées séduisent-elles aussi ceux, nombreux, qui se lassent des confusions entre politique et show-business !
Revenons à Jean-Luc Mélenchon…
Pour mieux analyser, lorsque j’entends les candidats, je note, par écrit, les propositions afin de les analyser en dehors de l’ambiance du discours. En les relisant, je suis stupéfait d’imaginer les millions de français adhérer à de tels projets, au point de voter pour ce candidat !
Voici quelques propositions de son programme officiel :
– Rétablissement des 35 heures,
– Droit à la retraite à 60 ans à taux plein,
– SMIC à 1.700 euros bruts par mois pour 35 heures,
– Instauration d’un salaire maximum pour toutes les entreprises,
– Augmentation immédiate des bourses d’études, élargissement des droits sociaux aux jeunes majeurs,
– Remboursement à 100 % des dépenses de santé,
– Blocage des loyers,
– Revenu maximum fixé à 360.000 euros par an,
– Titularisation des 800.000 précaires de la fonction publique,
– Régularisation des sans-papiers…
Evidemment, les moyens de réaliser un tel programme se résument à « prendre aux riches » comme tout bon révolutionnaire, en dépit du fait que l’Histoire a abondamment montré à quoi aboutissait ce genre de stratégie.
Prenons quelques exemples :
– Le SMIC à 1700€ pour 35H : Jean-Luc Mélenchon énonce, comme une évidence, que cette augmentation de salaire, qui se propagera à toutes les strates supérieures, sera bénéfique à l’économie puisqu’elle créera du pouvoir d’achat donc de la consommation, donc de la production, donc de l’emploi !
Pourquoi n’y avoir pas pensé plus tôt?
En réalité, les effets d’une telle augmentation seront à l’inverse de ce qui est décrit.
La hausse des salaires sera, immédiatement et évidemment, répercutée sur le prix des produits (comment faire autrement ? ) avec deux effets :
D’abord, le salarié qui aura été augmenté s’apercevra vite que son pouvoir d’achat, lui, n’a pas augmenté puisque les prix ont augmenté d’autant ! Pire, pour augmenter les salaires de tous les agents publics, il faudra augmenter les impôts et le pouvoir d’achat du salarié privé diminuera de ce prélèvement supplémentaire !
Ensuite, la compétitivité de l’entreprise sera compromise. Tous les produits fabriqués à l’étranger, qui n’auront pas à subir cette hausse de salaire, seront nettement moins chers que les produits fabriqués en France qu’ils viendront concurrencer. Cette perte de compétitivité entraînera fermetures d’entreprises et délocalisations, donc, des pertes d’emplois.
Pour éviter cette issue, il faut fermer les frontières et quitter l’Union Européenne et l’Euro. La dette augmentera mécaniquement de cette dévaluation automatique. Surtout, les 25% d’emplois qui travaillent pour l’exportation seront perdus et les produits étrangers bon marché disparaîtront au profit des produits français, chers, que plus personne ne pourra acheter !
Dans le même temps, les prêteurs des milliards d’euros, qui permettent au budget de l’Etat de financer les fonctionnaires, ne prêteront plus et, ayant quitté l’euro et l’Europe, nous n’aurons même plus la solution de la Grèce ou de l’Italie pour nous en sortir.
Ce sont les esquisses de ces politiques qui ont plongé la Grèce et le Portugal dans la crise actuelle. Les gouvernements socialistes ont augmenté les salaires, le nombre, comme la rémunération des fonctionnaires : on voit le résultat !
On notera qu’aucun des pays en crise n’envisage de quitter l’euro, ni l’Europe, dernière bouée de sauvetage des gouvernements fous.
En éteignant mon poste, je ne pouvais que regretter qu’un tel talent, pour entraîner, ne soit pas au service d’une vraie pédagogie démocratique, où l’indispensable justice sociale ne se nourrisse pas de l’amère jalousie et de propositions démagogiques qui ne pussent que laisser désillusions et déceptions.
Bravo pour cette analyse détaillée de propositions ubuesques. Je vous avoue craindre beaucoup pour cette élection car il y a fort à parier que nombre de Français se laisseront prendre à un tel discours.
Concernant la mesure dont vous faites preuve, je vous en félicite et regrette qu’il n’en soit pas ainsi de tout un chacun.
Soyez assuré de notre fidélité et notre reconnaissance.
Jacqueline et Jean-Pierre HURON