La redistribution par les tarifs publics est-elle garante de justice sociale ?
Je m’interrogeais hier sur les limites d’une fiscalité redistributive confinant, selon le Conseil Constitutionnel, à la confiscation. Je voudrais examiner un autre axe de la redistribution, souvent méconnu et mal chiffré : les tarifs publics ou semi publics !
En charge de la commission des affaires sociales du Conseil général durant plusieurs années, j’avais mesuré l’ampleur du phénomène sans pouvoir le traiter tant il est entré dans les mœurs.
Des places de crèches à celles des cantines, des centres de loisirs aux places de bus, de l’accès à la culture à la facturation des maisons de retraite ou des logements HLM, de nombreux tarifs prennent en compte les revenus de la famille qui utilise le service mis en place.
Comme la plupart de ces services sont déficitaires du fait de ces tarifs, c’est l’impôt qui vient compenser les pertes.
Aussi compréhensible soit-elle, cette redistribution par les prix pose de nombreux problèmes.
– Le premier problème est de justice sociale. Le mécanisme lui-même est souvent sommaire. Des effets de seuil faussent les prix et souvent un léger dépassement de la tranche des revenus a des conséquences financières importantes.
– Une tentation de fraude ou un soupçon de dissimulation dans la composition des familles (ne pas déclarer son conjoint et se dire célibataire !) ou dans la déclaration de revenus.
– Le cumul de cette redistribution par les prix finit par fausser la comparaison entre revenus d’activité et revenus de solidarité.
– Grave également, le fait qu’il devient impossible de mesurer la réalité du service rendu puisqu’il n’est plus payé à sa valeur. Chaque acteur social ou culturel, sportif ou économique peut demander toutes les aides qu’il souhaite au nom de la nécessité d’aider les plus défavorisés sans que personne ne sache si ces financement servent tous à l’objectif affiché ou à une rente pour les acteurs du service dont les personnels sont souvent mieux rémunérés que les personnels publics eux-mêmes !
– Le moins grave n’est sans doute pas le clientélisme et la démagogie qui s’immiscent immanquablement dans de telles pratiques. Rien n’est pire pour l’image publique que la « combine » qui se pare des atours de la vertu !
Je me suis souvent demandé s’il ne serait pas plus efficient d’augmenter le RSA plutôt que de cumuler ces aides dont on sait mal si toutes atteignent leur objectif, d’autant que, dès que le service est privatisé, la légitimité de ces aides à l’entreprise pose de vrais problèmes, comme nous le fait remarquer la Commission européenne.
Une réflexion sur ce thème me paraît indispensable à l’aube de l’élection municipale…
A suivre…